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Page:Zola - L'Assommoir.djvu/158

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LES ROUGON-MACQUART.

boutique, pendant près de dix minutes ? Lui, souriait d’un air gêné, comme s’il avait fait là une proposition blessante. Mais elle refusa vivement ; jamais elle n’accepterait de l’argent, sans savoir quand elle pourrait le rendre. Puis, il s’agissait vraiment d’une trop forte somme. Et comme il insistait, consterné, elle finit par crier :

— Mais votre mariage ? Je ne puis pas prendre l’argent de votre mariage, bien sûr !

— Oh ! ne vous gênez pas, répondit-il en rougissant à son tour. Je ne me marie plus. Vous savez, une idée… Vrai, j’aime mieux vous prêter l’argent.

Alors, tous deux baissèrent la tête. Il y avait entre eux quelque chose de très doux qu’ils ne disaient pas. Et Gervaise accepta. Goujet avait prévenu sa mère. Ils traversèrent le palier, allèrent la voir tout de suite. La dentellière était grave, un peu triste, son calme visage penché sur son tambour. Elle ne voulait pas contrarier son fils, mais elle n’approuvait plus le projet de Gervaise ; et elle dit nettement pourquoi : Coupeau tournait mal, Coupeau lui mangerait sa boutique. Elle ne pardonnait surtout point au zingueur d’avoir refusé d’apprendre à lire, pendant sa convalescence ; le forgeron s’était offert pour lui montrer, mais l’autre l’avait envoyé dinguer, en accusant la science de maigrir le monde. Cela avait presque fâché les deux ouvriers ; ils allaient chacun de son côté. D’ailleurs, madame Goujet, en voyant les regards suppliants de son grand enfant, se montra très bonne pour Gervaise. Il fut convenu qu’on prêterait cinq cents francs aux voisins ; ils les rembourseraient en donnant chaque mois un à-compte de vingt francs ; ça durerait ce que ça durerait.

— Dis donc ! le forgeron te fait de l’œil, s’écria