Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/103

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désespérants, les mains croisées sur sa jupe que tendaient ses genoux écartés. J’avais fini par ne plus avoir conscience de ce qui se passait autour de moi. Le bal tirant vers sa fin, j’étouffais davantage. C’est la seule & dernière sensation dont je me souvienne. Lorsque le galop final m’a tiré de cette sorte de stupeur profonde, j’ai vu Laurence se lever ; elle a juré & a donné un coup de pied au petit banc qui s’était embarrassé dans ses jupons ; puis, elle a pris mon bras, nous avons fait un dernier tour dans la salle avant de sortir. Sur le seuil, Laurence s’est tournée en bâillant, jetant un dernier regard à la ronde échevelée des danseurs qui vociféraient au milieu d’un vacarme épouvantable.

En mettant le pied dans la rue, un vent glacial, qui m’a frappé au visage, m’a causé une sensation délicieuse. Je me suis senti renaître au bien, à la vie libre & énergique ; l’ivresse s’est dissipée, &, sous la pluie fine de décembre, j’ai eu un instant d’ineffable