Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/160

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j’avais plus froid, je souffrais davantage. Je me souviens de ces premières journées comme d’un songe ; je vois la mansarde plus en désordre, plus noire que de coutume, je sens cet air épais & étouffant que la fenêtre ne renouvelait pas ; je nous aperçois, pareils à des ombres, allant dans nos haillons, nous embrassant, vivant en nous.

Oui, je l’aime, je l’aime avec emportement. Je m’interroge, & mon être entier me conte l’horrible histoire, me disant comment cela s’est fait. J’ai agrandi la blessure ; maintenant que j’ai fouillé en moi, maintenant que je connais la raison & la profondeur de mon amour, je sens que j’ai plus de fièvre, une passion plus âpre & plus folle.

Tout à l’heure je me révoltais à la pensée d’aimer Laurence. Mes fiertés sont mortes, car cette idée ne me vient plus. Je suis descendu jusqu’à Laurence, je la comprends maintenant, je ne veux pas qu’elle soit autre. Il y a une joie malsaine à se