Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/166

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contre le mur, pour faire place, en attendant qu’on lui fît occuper le milieu de la pièce. Les rideaux du lit étaient tirés ; le parquet, les étoffes, les meubles semblaient avoir été brossés & lavés avec soin. Nous étions en plein luxe, en plein festin.

J’allais assister, pour la première fois, à un de ces soupers dont il m’est arrivé jadis de rêver en provincial. Je me trouvais calme, reposé ; Laurence souriait, j’étais heureux de sa joie. Il y a dans l’éclat des bougies, dans la vue de bouteilles rougissantes, d’assiettes pleines de gâteaux & de viandes froides, dans la sensation d’une chambre close, lumineuse, tiède de parfums indéfinissables, une sorte de bien-être physique qui endort la pensée. Ma compagne, les lèvres ouvertes, retrouvait sans doute là des senteurs connues. Moi-même, je sentais le sang couler plus chaud & plus rapide dans ma chair ; j’éprouvais un besoin de rire & de boire, sollicité par mon corps que j’entendais vivre.