Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/232

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tant aux murs. J’ai ouvert de nouveau la fenêtre de Marie, ayant encore besoin de souffrance, ne pouvant me soustraire à la cuisante volupté de mes déchirements. La muraille, en face, était noire ; la toile venait de tomber sur le drame, la nuit régnait. En sortant, j’ai contemplé Marie qui dormait, les mains jointes. Je crois que je me suis agenouillé devant la couche, adressant à je ne sais quelle divinité une prière dont les paroles me montaient aux lèvres.

Je me suis couché, grelottant, & j’ai fermé les yeux. Je voyais, au travers de mes paupières, la lueur de la chandelle, posée sur une petite table en face de moi, & j’avais ainsi un large horizon rose que je peuplais de figures lamentables. J’ai la triste puissance du rêve, la faculté de créer de toutes pièces des personnages qui vivent presque de la vie réelle ; je les vois, je les touche, ils jouent comme des acteurs vivants les scènes qui se passent dans ma pensée. Je