Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le sein a frémi du tressaillement des mères, le poète, quand il croit sentir tressaillir la pensée en lui, doit avoir une heure d’extase & de recueillement. Il court s’enfermer avec son cher fardeau, n’ose croire à son bonheur, interroge son flanc, espère & doute encore. Puis, lorsqu’une douleur plus vive lui dit bien que Dieu l’a fécondé, alors pendant de longs mois il fuit la foule, tout à l’amour de l’être que le ciel lui confie.

Qu’on le laisse se cacher & jouir en avare des angoisses de l’enfantement ; demain, dans son orgueil, il viendra demander des caresses pour le fruit de ses entrailles.

Je suis pauvre, je dois vivre seul. Ma fierté souffrirait de banales consolations, ma main ne veut presser que les mains ses égales. J’ignore le monde, mais je sens que la misère est si froide qu’elle doit glacer les cœurs autour d’elle, & qu’étant sœur du vice, elle est timide & honteuse,