Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/257

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je sais ce que tu vas me dire, a repris Jacques avec plus de vivacité. Tu vas me dire que tu ne veux pas guérir, & que mon fer rouge ne fera pas même crier ta chair déjà trop meurtrie. Je sais encore ce que tu penses, car je vois ta colère & ton dédain. Tu penses que nous valons moins que toi, nous qui n’aimons, qui ne pleurons pas ; tu penses que nous avons fait ce monde, cette femme dont tu souffres, que nous sommes des lâches, des cruels, & que notre façon d’être jeune est plus honteuse que ton amour & ton abaissement. Tu viens me crier, à moi qui vis tranquille dans la même boue que toi, que tu te meurs de honte, que je manque d’âme, si je ne meurs pas avec toi. Tu as peut-être raison : je devrais sangloter, me tordre les bras. Seulement je ne me sens pas des besoins de pleurer ; je n’ai pas tes nerfs de femme, ton âpreté ni ta délicatesse de sensation. Je comprends que tu souffres par moi, par les autres, par tous