Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/288

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s’agrandir, elles peuvent rester ouvertes, saignant goutte à goutte, avec une souffrance sourde.

Frères, la main qui les a fermées est une main terrible, la main de la mort & de la vérité.

Hier, la nuit venait, la chambre de Marie s’emplissait d’ombre & de silence. Une bougie, cachée à demi derrière un vase de la cheminée, éclairait un coin du plafond ; les murs & le sol étaient sombres ; le lit blanchissait au milieu de ténèbres transparentes. Marie, plus pâle, plus brisée, avait fermé les yeux. Je savais qu’elle ne passerait pas la nuit. Pâquerette dormait dans son fauteuil, les mains jointes sur la taille, souriant en rêve à quelque gourmandise imaginaire ; le menton au corsage, elle ronflait doucement, & le bruit de son souffle se mêlait au râle affaibli de Marie. Je me suis senti étouffer entre cette jeune fille moribonde & cette vieille femme gorgée de nourriture. J’ai