Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/51

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faudra peut-être mourir demain, je ne puis travailler. Lorsque l’armoire était pleine, j’avais grand courage, je me sentais la force de gagner mon pain. Aujourd’hui, elle est vide, & tout m’est lassitude. Il me sera plus facile de souffrir la faim que de faire le moindre effort.

Allez, je sais bien que je suis lâche & parjure à nos serments, je sais que je n’ai pas le droit de me réfugier déjà dans la défaite. J’ai vingt ans : je ne puis être las d’un monde que j’ignore. Hier, je le rêvais doux & bon. Est-ce un nouveau rêve que de le juger mauvais aujourd’hui ?

Que voulez-vous, frères, mon premier pas a été malheureux : je n’ose avancer. Je vais épuiser ma souffrance, verser toutes mes larmes, & le sourire me reviendra. Je travaillerai plus gaîment demain.