sa verve faubourienne. Mais, à présent, il ne tolérait plus ce pervertisseur, ce mauvais ouvrier qui crachait sur toutes les besognes, afin d’en dégoûter les autres.
— Pourquoi dites-vous des absurdités pareilles ? cria-t-il. Vous savez bien que ce n’est pas vrai.
— Comment, pas vrai ?… Alors, maintenant, c’est pas vrai que nous sommes vendus ?… Ah ! dis donc, toi l’aristo ! est-ce que tu en es, de la bande à ces sales cochons de traîtres ?
Il s’avançait, menaçant.
— Tu sais, faudrait le dire, monsieur le bourgeois, parce que, sans attendre ton ami Bismarck, on te ferait tout de suite ton affaire.
Les autres, de même, commençaient à gronder, et Jean crut devoir intervenir.
— Silence donc ! je mets au rapport le premier qui bouge !
Mais Chouteau, ricanant, le hua. Il s’en fichait pas mal de son rapport ! Il se battrait ou il ne se battrait pas, à son idée ; et il ne fallait plus qu’on l’embêtât, parce qu’il n’avait pas des cartouches que pour les Prussiens. À présent que la bataille était commencée, le peu de discipline, maintenue par la peur, s’effondrait : qu’est-ce qu’on pouvait lui faire ? il filerait, dès qu’il en aurait assez. Et il fut grossier, excitant les autres contre le caporal, qui les laissait mourir de faim. Oui, c’était sa faute, si l’escouade n’avait rien mangé depuis trois jours, tandis que les camarades avaient eu de la soupe et de la viande. Mais monsieur était allé se goberger avec l’aristo chez des filles. On les avait bien vus, à Sedan.
— Tu as boulotté l’argent de l’escouade, ose donc dire le contraire, bougre de fricoteur !
Du coup, les choses se gâtèrent. Lapoulle serrait les poings, et Pache, malgré sa douceur, affolé par la faim, voulait qu’on s’expliquât. Le plus raisonnable fut encore