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Page:Zola - La Débâcle.djvu/412

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revenir à droite, sentir qu’on ne sert absolument à rien, ça finit par ne pas être une existence… et puis, maintenant, mon pauvre Zéphir est mort, je serais tout seul, je n’ai plus qu’à me remettre à la terre. N’est-ce pas ? ça vaudra mieux que d’être prisonnier chez les Prussiens… Vous avez des chevaux, père Fouchard, vous verrez si je les aime et si je les soigne !

L’œil du vieux avait brillé. Il trinqua encore, il conclut sans hâte :

— Mon Dieu ! puisque ça te rend service, je veux bien tout de même, je te prends… Mais, quant aux gages, faudra n’en parler que lorsque la guerre sera finie, car je n’ai vraiment besoin de personne, et les temps sont trop durs.

Silvine, qui était restée assise, avec Charlot sur les genoux, n’avait pas quitté Prosper des yeux. Lorsqu’elle le vit se lever, pour se rendre tout de suite à l’écurie et faire la connaissance des bêtes, elle demanda de nouveau :

— Alors, vous n’avez pas vu Honoré ?

Cette question qui revenait si brusquement, le fit tressaillir, comme si elle éclairait d’une lumière subite un coin obscur de sa mémoire. Il hésita encore, se décida pourtant.

— Écoutez, je n’ai pas voulu vous faire de la peine tout à l’heure, mais je crois bien qu’Honoré est resté là-bas.

— Comment, resté ?

— Oui, je crois que les Prussiens lui ont fait son affaire… Je l’ai vu à moitié renversé sur un canon, la tête droite, avec un trou sous le cœur.

Il y eut un silence. Silvine avait blêmi affreusement, tandis que le père Fouchard, saisi, remettait sur la table son verre, où il avait achevé de vider la bouteille.

— Vous en êtes bien sûr ? reprit-elle d’une voix étranglée.