Page:Zola - La Faute de l'abbé Mouret.djvu/233

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XII


Mais, les jours suivants, Albine et Serge restèrent embarrassés l’un devant l’autre. Ils évitèrent de faire aucune allusion à leur promenade sous les arbres. Ils n’avaient pas échangé un baiser, ils ne s’étaient pas dit qu’ils s’aimaient. Ce n’était point une honte qui les empêchait de parler, mais une crainte, une peur de gâter leur joie. Et, lorsqu’ils n’étaient plus ensemble, ils ne vivaient que du bon souvenir ; ils s’y enfonçaient, ils revivaient les heures qu’ils avaient passées, les bras à la taille, à se caresser le visage de leur haleine. Cela avait fini par leur donner une grosse fièvre. Ils se regardaient, les yeux meurtris, très-tristes, causant de choses qui ne les intéressaient pas. Puis, après de longs silences, Serge demandait à Albine d’une voix inquiète :

— Tu es souffrante ?

Mais elle hochait la tête ; elle répondait :

— Non, non. C’est toi qui ne te portes pas bien. Tes mains brûlent.

Le parc leur causait une sourde inquiétude qu’ils ne