Page:Zola - La Faute de l'abbé Mouret.djvu/50

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VIII


Au soleil de midi, la maison dormait, les persiennes closes, dans le bourdonnement des grosses mouches qui montaient le long du lierre, jusqu’aux tuiles. Une paix heureuse baignait cette ruine ensoleillée. Le docteur poussa la porte de l’étroit jardin, qu’une haie vive, très-élevée, entourait. Là, à l’ombre d’un pan de mur, Jeanbernat, redressant sa haute taille, fumait tranquillement sa pipe, dans le grand silence, en regardant pousser ses légumes.

— Comment ! vous êtes debout, farceur ! cria le docteur stupéfait.

— Vous veniez donc m’enterrer, vous ! gronda le vieillard rudement. Je n’ai besoin de personne. Je me suis saigné…

Il s’arrêta net en apercevant le prêtre, et eut un geste si terrible, que l’oncle Pascal s’empressa d’intervenir.

— C’est mon neveu, dit-il, le nouveau curé des Artaud, un brave garçon… Que diable ! nous n’avons pas couru les routes à pareille heure pour vous manger, père Jeanbernat.

Le vieux se calma un peu.

— Je ne veux pas de calotin chez moi, murmura-t-il. Ça