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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/118

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soixante-quinze ans à la Chandeleur. Lui, reste droit comme un peuplier. Il vient et s’asseoit près de Jean-Louis, d’un air sérieux. Jean-Louis qui ne peut plus parler, le regarde de ses petits yeux pâlis. Le père Nicolas le regarde aussi, n’ayant rien à lui dire. Et ces deux vieillards restent face à face pendant une heure, sans prononcer une parole, heureux de se voir, se rappelant sans doute des choses, bien loin, dans leurs jours d’autrefois. C’est ce soir-là que les enfants, au retour de la moisson, trouvent Jean-Louis mort, étendu sur le dos, raide et les yeux en l’air.

Oui, le vieux est mort, sans remuer un membre. Il a soufflé son dernier souffle droit devant lui, une haleine de plus dans la vaste campagne. Comme les bêtes qui se cachent et se résignent, il n’a pas même dérangé un voisin, il a fait sa petite affaire tout seul.

— Le père est mort, dit Joseph, en appelant les autres.

Et tous, Antoine, Catherine, Jacquinet, répètent :

— Le père est mort.

Ça ne les étonne pas. Jacquinet allonge curieusement le cou, la femme tire son mouchoir, les deux garçons marchent sans rien dire, la face grave et blêmie sous le hâle. Il a tout de même joliment