Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/138

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D’ailleurs, le trouble que lui causait l’hôtel de Marsanne, ne dérangeait pas ses habitudes, d’une régularité d’horloge. Il allait à son bureau, il déjeunait, dînait, faisait son tour de promenade au bord du Chanteclair. L’hôtel lui-même, avec sa grande paix, finissait par entrer dans la douceur de sa vie. Deux années se passèrent. Il était tellement habitué aux herbes du perron, à la façade grise, aux persiennes noires, que ces choses lui semblaient définitives, nécessaires au sommeil du quartier.

Depuis cinq ans, Julien habitait la place des Quatre-Femmes, lorsque, un soir de juillet, un événement bouleversa son existence. La nuit était très chaude, tout allumée d’étoiles. Il jouait de la flûte sans lumière, mais d’une lèvre distraite, ralentissant le rythme et s’endormant sur certains sons, lorsque, tout d’un coup, en face de lui, une fenêtre de l’hôtel de Marsanne s’ouvrit et resta béante, vivement éclairée dans la façade sombre. Une jeune fille était venue s’accouder, et elle demeurait là, elle découpait sa mince silhouette, levait la tête comme pour prêter l’oreille. Julien, tremblant, avait cessé de jouer. Il ne pouvait distinguer le visage de la jeune fille, il ne voyait que le flot de ses cheveux, déjà dénoués sur son cou. Et