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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/151

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aimait le sang, car elle avait du sang aux lèvres, et la pâleur de sa face venait de son mépris du monde. Puis, il pleurait de l’avoir insultée, il lui demandait pardon, comme à une sainte enveloppée dans la pureté de ses ailes.

Pendant cette première année, les jours suivirent les jours, sans amener un changement. Lorsque l’été revint, il éprouva une singulière sensation : Thérèse lui sembla marcher dans un autre air. C’étaient toujours les mêmes petits événements, les persiennes poussées le matin et refermées le soir, les apparitions régulières aux heures accoutumées ; mais un souffle nouveau sortait de la chambre. Thérèse était plus pâle, plus grande. Un jour de fièvre, il se hasarda une troisième fois à lui adresser un baiser du bout de ses doigts fiévreux. Elle le regarda fixement, avec sa gravité troublante, sans quitter la fenêtre. Ce fut lui qui se retira, la face empourprée.

Un seul fait nouveau, vers la fin de l’été, se produisit et le secoua profondément, bien que ce fait fût des plus simples. Presque tous les jours, au crépuscule, la croisée de Thérèse, laissée entr’ouverte, se fermait violemment, avec un craquement de toute la boiserie et de l’espagnolette. Ce bruit faisait tressaillir Julien d’un sursaut douloureux ;