Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/236

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atteindre le chiffre de deux cents habitants. La gorge qui débouche sur la mer, et au seuil de laquelle le village se trouve planté, s’enfonce dans les terres par des détours si brusques et des pentes si raides, qu’il est à peu près impossible d’y passer avec des voitures. Cela coupe toutes les communications et isole le pays, où l’on semble être à cent lieues des hameaux voisins. Aussi, les habitants n’ont-ils avec Grandport des communications que par eau. Presque tous pêcheurs, vivant de l’Océan, ils y portent chaque jour le poisson dans leurs barques. Une grande maison de factage, la maison Dufeu, achète leur pêche à forfait. Le père Dufeu est mort depuis quelques années, mais la veuve Dufeu a continué les affaires ; elle a simplement pris un commis, M. Mouchel, grand diable blond, chargé de battre la côte et de traiter avec les pêcheurs. Ce M. Mouchel est l’unique lien entre Coqueville et le monde civilisé.

Coqueville mériterait un historien. Il semble certain que le village, dans la nuit des temps, fut fondé par les Mahé, une famille qui vint s’établir là et qui poussa fortement au pied de falaise. Ces Mahé durent prospérer d’abord, en se mariant toujours entre eux, car pendant des siècles on ne trouve que des Mahé. Puis, sous Louis XIII, appa-