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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/276

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tout le monde pleura, tellement on était ému. Les Mahé et les Floche s’embrassèrent, eux qui se dévoraient depuis trois siècles. L’abbé Radiguet, très touché, parla encore du doigt de Dieu. On trinqua avec les trois liqueurs, la bleue, la blanche et la rouge.

— Vive la France ! criait l’Empereur.

La bleue ne valait rien, la blanche pas grand’chose, mais la rouge était vraiment réussie. On tapa ensuite sur les tonneaux des Floche. Puis, on dansa. Comme il n’y avait pas de musique, des garçons de bonne volonté frappaient dans leurs mains en sifflant, ce qui enlevait les filles. La fête devint superbe. Les sept tonneaux étaient rangés à la file ; chacun pouvait choisir ce qu’il aimait le mieux. Ceux qui en avaient assez, s’allongeaient sur le sable, où ils dormaient un somme ; et, quand ils se réveillaient, ils recommençaient. Les autres élargissaient peu à peu le bal, prenaient toute la plage. Jusqu’à minuit, on sauta en plein air. La mer avait un bruit doux, les étoiles luisaient dans un ciel profond, d’une paix immense. C’était une sérénité des âges enfants, enveloppant la joie d’une tribu de sauvages, grisée par son premier tonneau d’eau-de-vie.

Pourtant, Coqueville rentrait encore se coucher.