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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/340

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dans la Garonne, pour m’en aller par le chemin que tous ont suivi. Je n’ai plus un enfant, ma maison est détruite, mes champs sont ravagés. Oh ! le soir, quand nous étions tous à table, les vieux au milieu, les plus jeunes à la file, et que cette gaieté m’entourait et me tenait chaud ! Oh ! les grands jours de la moisson et de la vendange, quand nous étions tous au travail, et que nous rentrions gonflés de l’orgueil de notre richesse ! Oh ! les beaux enfants et les belles vignes, les belles filles et les beaux blés, la joie de ma vieillesse, la vivante récompense de ma vie entière ! Puisque tout cela est mort, mon Dieu ! pourquoi voulez-vous que je vive ?

Il n’y a pas de consolation. Je ne veux pas de secours. Je donnerai mes champs aux gens du village qui ont encore leurs enfants. Eux, trouveront le courage de débarrasser la terre des épaves et de la cultiver de nouveau. Quand on n’a plus d’enfants, un coin suffit pour mourir.

J’ai eu une seule envie, une dernière envie. J’aurais voulu retrouver les corps des miens, afin de les faire enterrer dans notre cimetière, sous une dalle où je serais allé les rejoindre. On racontait qu’on avait repêché, à Toulouse, une quantité de