Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/38

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çus. Cela lui sembla louche ; il n’en parla pas à Burle, il se promit de revoir les additions. La semaine suivante, nouvelle erreur, dix-neuf francs en moins. Alors, saisi d’inquiétude, il s’enferma avec les registres, il passa une matinée abominable à tout reprendre, à tout additionner, suant, jurant, le crâne éclatant de chiffres. Et, à chaque addition, il constatait un vol de quelques francs : c’était misérable, dix francs, huit francs, onze francs ; dans les dernières, cela tombait à quatre et trois francs, et il y en avait même une sur laquelle Burle n’avait pris qu’un franc cinquante. Depuis près de deux mois, le capitaine rognait ainsi les écus de sa caisse. En comparant les dates, le major put établir que la fameuse leçon l’avait fait se tenir tranquille juste pendant huit jours. Cette découverte acheva de l’exaspérer.

— Nom de Dieu de nom de Dieu ! gueulait-il tout seul, en donnant des coups de poing sur les registres, c’est encore plus sale !… Au moins les faux reçus de Gagneux, c’était crâne… Tandis que, cette fois, nom de Dieu ! le voilà aussi bas qu’une cuisinière qui chipe deux sous sur un pot-au-feu… Aller gratter sur les additions ! Foutre un franc cinquante dans sa poche !… Nom de Dieu ! nom de Dieu !… Sois donc plus fier, salaud !…