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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/92

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on s’est fixé un chiffre, on doit l’atteindre.

Pourtant, deux fois déjà, madame Rousseau a dû prendre le lit. Elle s’est relevée, est redescendue au comptoir. Les voisins disent : « Voilà une petite femme qui n’ira pas loin. » Et ils ne se trompent pas. Juste au moment de l’inventaire, elle reprend le lit une troisième fois. Le médecin vient le matin, cause avec elle, signe une ordonnance d’une main distraite. M. Rousseau, prévenu, sait que le fatal dénouement approche. Mais l’inventaire le tient en bas, dans la boutique, et c’est à peine s’il peut s’échapper cinq minutes, de temps à autre. Il monte, quand le médecin est là ; puis, il s’en va avec lui et reparaît un instant avant le déjeuner ; il se couche à onze heures, au fond d’un cabinet, où il a fait mettre un lit de sangles. C’est la bonne, Françoise, qui soigne la malade. Une terrible fille, cette Françoise, une auvergnate aux grosses mains brutales, d’une politesse et d’une propreté douteuses ! Elle bouscule la mourante, lui apporte ses potions d’un air maussade, fait un bruit intolérable en balayant la chambre, qu’elle laisse dans un grand désordre ; des fioles toutes poissées traînent sur la commode, les cuvettes ne sont jamais lavées, les torchons pendent aux dossiers des chaises ; on ne sait plus où mettre