Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/196

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au théâtre. M. de Lapommeraye, si elles réussissaient, serait le premier à les applaudir et à les louer devant son public. Alors, nous serions parfaitement d’accord, ce que je désire de tout mon cœur.

Un autre critique, M. Poignand, veut bien également n’être pas de mon avis. Je néglige les attaques qu’il dirige contre mes propres œuvres ; c’est là un massacre enfantin, auquel je m’habitue, et dont je souris. Je ne m’arrête pas également à son amusant paradoxe, par lequel ce sont les personnages historiques qui sont vivants, tandis que nous autres, vivants, nous sommes morts. Mais il fait sur le drame historique des réflexions qui m’intéressent.

Je crois avoir moi-même indiqué que le drame historique prendrait seulement de l’intérêt, le jour où les auteurs, renonçant aux pantins de fantaisie, s’aviseront de ressusciter les personnages réels, avec leurs tempéraments et leurs idées, avec toute l’époque qui les entoure. M. Poignand annonce la venue d’une jeune école, qui songe à ces résurrections de l’histoire. Voilà qui est parfait. L’entreprise est formidable, car elle nécessitera des recherches immenses et un talent d’évocation rare. Mais j’applaudirai très volontiers, si elle réussit. D’ailleurs, M. Poignand ne s’aperçoit peut-être pas que le drame dont il parle serait le drame historique naturaliste. Gustave Flaubert n’a pas suivi une autre méthode pour écrire Salammbô. J’accepte parfaitement le drame historique, ainsi compris, parce qu’il mène tout droit au drame moderne, tel que je le demande. On ne peut pas être exclusif : si l’on ressuscite le passé, c’est tout le moins qu’on laisse vivre le présent.



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