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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/255

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la plume, je ne puis qu’indiquer les sujets d’étude qu’il faudrait approfondir, si l’on voulait éclairer tout à fait les questions. Ainsi rien ne serait plus intéressant que d’étudier la marche de notre théâtre historique vers les documents exacts. On sait quelle place l’histoire tenait dans la tragédie ; une phrase de Tacite, une page de tout autre historien, suffisait ; et là-dessus l’auteur écrivait sa pièce, sans se soucier le moins du monde de reconstituer le milieu, prêtant les sentiments contemporains aux héros de l’antiquité, s’efforçant uniquement de peindre l’homme abstrait, l’homme métaphysique, selon la logique et la rhétorique du temps. Quand le drame romantique s’est produit, il a eu la prétention justifiée de rétablir les milieux ; et, s’il a peu réussi à faire vivre les personnages exacts, il ne les a pas moins humanisés, en leur donnant des os et de la chair. Voilà donc une première conquête sur la convention, très certaine, très marquée. Et je n’indique que les grandes lignes ; cela s’est fait lentement, avec toutes sortes de nuances, de batailles et de victoires.

Aujourd’hui, nous en sommes là. La pièce historique, qui n’était qu’une dissertation dialoguée sur un sujet quelconque, devient de jour en jour une étude critique. Et c’est le moment qu’on choisit pour nous dire : « Restons dans la convention, la vérité historique est impossible. » Vraiment, c’est se moquer du monde. Le pis est que les critiques pratiques qui donnent de pareils conseils aux jeunes auteurs, les égarent absolument. Il faut toujours se reporter à l’expérience, à ce qui se passe sous nos yeux. Nous ne sommes même plus au temps où Alexandre Dumas accommodait l’histoire d’une si singulière et si