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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/313

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n’ont sûrement ni cervelles ni entrailles. Quant au drame, il devient une combinaison, plus ou moins ingénieuse ; on entend le petit claquement des pièces sur l’échiquier, et le problème est résolu, la critique se contente de déclarer le lendemain : « Bien joué ! » ou : « Mal joué ! » De l’étude humaine, de l’analyse des tempéraments, de la nature des milieux, pas un mot !

Voilà, n’est-ce pas, qui est d’un grand vol, voilà qui élargit singulièrement notre littérature dramatique ! Remarquez que les pièces à situations qui règnent aujourd’hui, n’ont envahi le théâtre que depuis le commencement du siècle. Ce sont elles qui ont imposé l’étrange code auquel on veut soumettre tous les débutants. Les fameuses règles, le critérium d’après lequel on juge si tel écrivain est ou n’est pas doué pour le théâtre, viennent de ces pièces. Peu à peu, elles se sont imposées comme un amusement facile qui intéresse sans faire penser, et on a voulu plier toutes les productions dramatiques à leur formule. Il n’a plus été question que « des scènes à faire ». On a déserté la grande étude humaine pour ce joujou, mettre des bonshommes en bataille et leur faire exécuter des culbutes de plus en plus compliquées. Ajoutez que des esprits ingénieux, et même quelques esprits puissants, se sont livrés à ce jeu et y ont accompli des merveilles. Voilà comment le théâtre actuel,—une simple formule passagère dont on veut faire « le théâtre »,—occupe les planches, à la grande tristesse des écrivains naturalistes.

Souvent la critique cite les maîtres. C’est pourtant peu les honorer que de ne point se montrer sévère pour les pièces à situations. Dans toutes les littératures,