Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/408

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de bruit, une enfilade de scènes destinées à agir sur le gros public. C’est l’art des tréteaux, avec les ressources de la mise en scène moderne.

Je ne parle pas de la vérité. Une des choses qui m’ont le plus stupéfié, ç’a été de voir une troupe de gardes, les gardes de la duchesse de Nevers, passer par la chambre à coucher de la reine de Navarre. La duchesse traverse la chambre, il est vrai ; mais est-il acceptable que les gardes la traversent aussi ? Je me demande encore ce que ces gardes font là. Une chose bien étrange aussi, c’est la façon dont le roi tire sur le peuple. Il dirige d’abord son arme sur Henri de Navarre, puis reculant pour ne pas céder à une pensée criminelle, il s’écrie : « Il faut pourtant que je tue quelqu’un ! » Et il tire par la fenêtre. Remarquez que le Charles IX du drame est un personnage sympathique ; les auteurs ne lui ont donné que cet accès de férocité, pour utiliser la légende : c’est un placage visible, d’un effet qui consterne. Le pis est qu’on charge si fortement l’arquebuse, afin d’émouvoir la salle sans doute, que le roi a l’air de tirer un coup de canon.

La partie la plus puissante du drame est l’empoisonnement de Charles IX, à l’aide d’un livre de chasse, dont Catherine de Médicis a trempé les pages dans une solution d’arsenic et qu’elle destinait à Henri de Navarre. La fatalité vengeresse veut que la mère tue ainsi son propre fils. Ajoutez que le duc d’Alençon, le frère du roi, surprenant celui-ci en train de s’empoisonner, en mouillant son doigt afin de tourner les pages, le laisse tranquillement continuer, jugeant l’occasion bonne pour monter sur le trône. Une famille intéressante, vraiment ! A ce propos, je faisais