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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/88

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apportent précisément des millions avec elles. Je ne veux pas parler musique, je ne cherche pas à savoir si les théâtres lyriques ne traversent point en ce moment la même crise que les théâtres de drames. C’est la question littéraire que je désire traiter, et j’y arrive.

D’abord, j’enregistre un aveu. Voici trois ans que je ne cesse de répéter que le drame se meurt, que le drame est mort. Lorsque j’ai dit que les planches étaient vides, on m’a répondu que j’insultais nos gloires dramatiques ; à entendre la critique, jamais le théâtre n’aurait jeté un tel éclat en France. Et voilà brusquement que l’on confesse notre pauvreté et notre médiocrité. On me donne raison, après s’être fâché et m’avoir quelque peu injurié. On constate la crise actuelle, on se lamente sur le malheureux sort de la Porte-Saint-Martin, vouée aux ours et aux baleines ; de la Gaieté, agonisant avec la féerie ; du Châtelet et du Théâtre-Historique, vivant de reprises ; de l’Ambigu, où les directions se succèdent sous une pluie battante de protêts. Eh bien ! nous sommes donc enfin d’accord. Tout va de mal en pis, le drame est en train de disparaître, si on ne parvient pas à le ressusciter. Je n’ai jamais dit autre chose.

Seulement, je crois fort que nous différons absolument sur le remède possible. La queue romantique, inquiète et irritée de la disparition du drame selon la formule de 1830, s’est avisée de déclarer que, si le drame mourait, cela venait simplement de ce qu’on n’avait point assez d’argent pour le faire vivre. Mon Dieu ! c’était bien simple ; si l’on voulait une renaissance, il s’agissait simplement d’ouvrir un nouveau théâtre qui jouerait, aux frais de l’État, toutes les