Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/17

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entre les bras de son amant, toutes ses pudeurs effrayées de jeune fille s’éveillèrent, et elle frissonna, prise d’un malaise inconnu. Elle s’abandonnait, elle était heureuse et épouvantée de se trouver livrée ainsi à la passion de Philippe. Elle défaillait, elle voulait gagner du temps.

« Écoute, dit-elle, je vais écrire à l’abbé Chastanier, mon confesseur… Il ira voir mon oncle, pour obtenir de lui mon pardon et le décider à nous marier ensemble… Il me semble que je tremblerais moins si j’étais ta femme. »

Philippe sourit de la naïveté tendre de cette dernière phrase.

« Écris à l’abbé Chastanier, répondit-il. Moi, je vais faire connaître notre retraite à mon frère. Il viendra demain et portera ta lettre. »

Puis, la nuit se fit, chaude et voluptueuse. Et Blanche devint l’épouse de Philippe. Elle s’était livrée d’elle-même, elle n’avait pas eu un cri de révolte, elle péchait par ignorance, comme Philippe péchait par ambition et par passion. Ah ! la douce et terrible nuit ! Elle devait frapper les amants de misère et leur apporter toute une existence de souffrance et de regrets.

Ce fut ainsi que Blanche de Cazalis s’enfuit avec Philippe Cayol, par une claire soirée de mai.