Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/173

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savoir au juste où il avait pris l’argent nécessaire. Puis, il déploya une activité fébrile. En très peu de temps, son étude prit une extension considérable. Il se plaça à la tête du notariat de Marseille, ouvrant sa porte toute grande et se créant une clientèle qui augmentait chaque jour. Son procédé fut d’une grande simplicité : il n’éconduisait jamais un client, répondait à toutes les demandes ; il trouvait toujours de l’argent pour les gens qui désiraient emprunter, et il avait toujours des placements excellents pour ceux qui lui confiaient des valeurs. Un roulement de fonds considérable s’établit ainsi dans son étude.

Dans les commencements, on s’étonna un peu des succès rapides de Douglas. On paria d’imprudence, on trouva que le jeune notaire marchait trop vite et se chargeait d’un trop lourd fardeau. Puis, on ne s’expliquait pas bien les moyens qu’il employait pour faire face aux exigences que lui créait l’accroissement continuel de ses affaires. Mais Douglas calma les inquiétudes du public par la simplicité de sa vie. On le croyait très riche, et il gardait des vêtements modestes, n’affichait aucun luxe, ne prenait aucun plaisir. Chacun sut qu’il menait une existence sobre, se nourrissant mal, vivant en petit bourgeois. D’ailleurs, il était d’une grande piété, il faisait de larges aumônes, allait à l’église demeurait à genoux pendant toute la durée des offices. Dès lors, il acquit une réputation d’honnête homme qui se consolida de jour en jour. On finit par le citer comme un modèle de sainteté et d’honneur. Son nom fut respecté et aimé.

Il avait mis à peine six ans pour arriver à ce résultat. Pendant six années, il se tint à la tête du notariat marseillais : son étude resta la plus fréquentée, celle où se traitaient le plus d’affaires. Les gens riches tenaient à honneur d’avoir pour notaire cet homme pieux et modeste, doué de toutes les vertus. La noblesse, le clergé le soutenaient, les gens de commerce avaient fini par se montrer d’une foi aveugle en sa loyauté. La