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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/259

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du côté de l’Estaque, et là Marius et Claire étaient devenus de bons camarades. Les braves cœurs se devinent mutuellement et ne tardent pas à s’entendre.

La belle dévote, en voyant entrer l’employé, se leva vivement pour lui tendre la main.

« C’est vous, Marius ! dit-elle gaiement. Vous voilà guéri... Ah ! tant mieux. Le Ciel m’a exaucée. »

Le jeune homme fut ému de cet accueil amical. Il regarda dans les yeux de la jeune fille, il n’y trouva qu’une flamme pure, qu’une virginité calme. Il fut comme soulagé d’un poids qui l’étouffait, tant ce regard lui parut ferme et droit.

« Je vous remercie, répondit-il. Mais je ne viens pas pour vous faire voir un revenant... »

Et il ajouta en présentant le paroissien :

« Voici un livre de messe que vous avez, paraît-il, oublié hier à Saint-Victor.

– Ah ! oui, dit la jeune fille, j’allais l’envoyer chercher.... Comment est-il entre vos mains ?

– Un sacristain vient de l’apporter.

– Un sacristain ?

– Oui, de la part de l’abbé Donadéi. »

Claire prit le livre, le posa tranquillement sur un meuble, sans paraître éprouver aucune émotion. Marius la suivait anxieusement du regard. Si la moindre rougeur fut montée à ses joues, il eut pensé que tout était perdu.

« À propos, reprit la jeune fille en s’asseyant, vous connaissez, je crois, M. Chastanier.

– Oui, répondit Marius, étonné.

– C’est un excellent homme, n’est-ce pas ?

– Certes, un brave cœur, un esprit profondément pieux et honnête.

– Mon frère m’en a fait un grand éloge ; mais vous savez, en matière de religion, je n’ai pas en mon frère une confiance illimitée. »

Elle sourit. Marius ne comprenait pas où elle voulait en venir ; seulement, il la trouvait si paisible, si heureuse, qu’il se sentait entièrement rassuré.