Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/282

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

debout, prêt à partir. Marius put à peine le reconnaître, tant il avait pâli et maigri. Ils s’embrassèrent silencieusement, évitant de parler pour ne point faire de bruit. Le geôlier alla à la fenêtre, détacha le barreau, noua le bout de la corde. Fine était restée dans le couloir pour faire le guet. Et ils revinrent tous quatre par les corridors étroits, se glissant lentement le long des murs, redoutant de se heurter dans l’ombre.

Marius n’avait pas quitté la main de Philippe. Quand ils furent revenus à la geôle, il jeta un caban sur le dos de son frère, lui cacha la tête dans le capuchon, et voulut s’éloigner tout de suite. Maintenant qu’il touchait au but de ses efforts, il craignait d’échouer. Au moindre bruit, il frissonnait. Revertégat eut beaucoup de peine à le faire patienter pendant dix minutes, craignant que le bruit de leur marche dans les corridors n’eût donné l’éveil ; et il voulait n’ouvrir la porte qu’à coup sûr. Un silence profond régnait dans la prison. Alors, il se décida à tirer les verroux.

Les deux frères s’échappèrent vivement et se dirigèrent, la tête baissée, vers la place des Prêcheurs. Fine resta un instant en arrière, pour remettre les quinze mille francs à son oncle. Elle rejoignit ses compagnons au moment où ils allaient s’engager dans la petite rue Saint-Jean.

Ils prirent ensuite le Cours, où ils marchèrent dans l’ombre noire des arbres. Une seule crainte leur restait : il leur fallait sortir de la ville, alors fermée de portes que des gardiens étaient chargés d’ouvrir aux gens attardés ; et ils redoutaient d’être arrêtés là misérablement. Ils marchaient toujours, guettant autour d’eux, se défiant des rares passants qu’ils rencontraient. À la hauteur de la rue des Carmes, ils aperçurent un homme qui se mit à les suivre. Leur cœur battit à se rompre.

Brusquement, l’inconnu hâta le pas et vint gaillardement frapper sur l’épaule de Marius.

« Eh ! je ne me trompe point, dit-il, c’est vous, mon