Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/289

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de votre solitude ? demanda doucement le prêtre.

– Eh ! il ne s’agit pas de moi, mon père. Si j’étais seule menacée d’une prison peut-être éternelle, je me résignerais... Mais je tremble pour ce pauvre petit que je vais mettre au monde.

– Que pouvez-vous craindre ?

– Que sais-je ?... Si mon oncle n’avait pas certains projets, il ne m’enfermerait point ainsi. Songez à toutes les précautions que l’on prend pour m’isoler, pour m’empêcher de communiquer même avec vous... Je suis sûre que Mme Lambert se désespère en ce moment.

– Vous exagérez.

– Non, vous savez que je dis la vérité, vous cherchez à calmer mes inquiétudes. Voyez-vous, tout cela m’épouvante, et je crains pour mon enfant, je crains un malheur que je sens là, dans l’ombre. »

Elle garda un silence douloureux et reprit brusquement, d’une voix déchirée :

« Voulez-vous m’aider à sauver mon enfant ? »

Le prêtre fut surpris et troublé par ce cri. Il hésita, n’osant répondre.

« Calmez-vous, dit-il enfin. Vous savez que je vous suis tout dévoué.

– Je vous le répète, continua Blanche, j’ai fait le sacrifice de mes joies, mais je désire que mon enfant soit heureux.

– Que puis-je faire pour vous ? » demanda l’abbé Chastanier, ému.

Mme Lambert s’était rapprochée peu à peu. Elle avait fini par marcher sur les talons des promeneurs. Blanche entendit le bruit de ses pas sur les cailloux. Elle se pencha et dit à voix basse au prêtre :

« Priez Fine de venir ici demain vers six heures et de passer près de moi, sans que Mme Lambert puisse la reconnaître. »

Le lendemain, Blanche et sa gouvernante se promenaient sur la falaise, au coucher du soleil. Pendant la journée, la jeune femme s’était plainte de violentes