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II

Le plan de M. de Cazalis


Comme le disait Blanche, si son oncle n’avait pas eu certains projets, il ne l’aurait point enfermée ainsi. Le désir de cacher la grossesse de la jeune femme ne justifiait pas l’excès de précautions que prenait M. de Cazalis pour l’isoler et la tenir complètement en sa puissance. Le rôle impitoyable que jouait Mme Lambert, l’attitude grave et sévère du député, la vie solitaire qu’on lui faisait mener, tout avertissait la malheureuse que quelque événement cruel se tramait dans l’ombre et la menaçait. Par un instinct maternel, elle sentait que ce n’était point elle qu’on voulait frapper, mais l’enfant qu’elle portait encore dans son sein. On attendait sans doute la naissance de ce pauvre petit, et alors se passerait quelque chose de terrible qu’elle ne pouvait prévoir, mais dont la pensée la faisait trembler.

Les craintes de Blanche étaient exagérées. La solitude dans laquelle elle vivait exaltait ses pensées et dressait devant elle des hallucinations horribles. M. de Cazalis n’était pas homme à se compromettre en martyrisant un enfant. Il désirait simplement faire disparaître le plus tôt possible l’héritier de Blanche. Voici, du reste, en quelques mots, le plan qu’il avait arrêté, et les raisons qui le poussaient à employer de pareils moyens.

Blanche, à la mort de son père, s’était trouvée riche de plusieurs centaines de mille francs. Elle avait dix ans.