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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/33

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ses amis les prêtres et les nobles. Comme tuteur de Blanche, qui était orpheline et dont il gérait la fortune, il activait les recherches de la justice, il préparait le procès criminel. On eût dit qu’il prenait à tâche de donner, au spectacle gratuit qui allait commencer, la plus large publicité possible.

Une des premières mesures prises par lui fut de faire arrêter la mère de Philippe Cayol. Lorsque le procureur du roi se présenta chez elle, la pauvre dame répondit à toutes les questions qu’elle ignorait ce qu’était devenu son fils. Son trouble, ses angoisses, ses craintes de mère, qui la firent balbutier, furent sans doute considérés comme des preuves de complicité. On l’emprisonna, voyant en elle un otage, espérant peut-être que son fils viendrait se rendre pour la délivrer.

À la nouvelle de l’arrestation de sa mère, Marius devint comme fou. Il la savait de santé chancelante, il se l’imaginait avec terreur au fond d’une cellule nue et glaciale ; elle mourrait là, elle y serait torturée par toutes les angoisses de la souffrance et du désespoir.

Marius fut lui-même inquiété pendant un moment. Mais ses réponses fermes et la caution que son patron, l’armateur Martelly, offrit de donner pour lui, le sauvèrent de l’emprisonnement. Il voulait rester libre pour travailler au salut de sa famille.

Peu à peu, son esprit droit vit clairement les faits. Dans le premier moment, il avait été accablé par la culpabilité de Philippe, il n’avait distingué que la faute irréparable de son frère. Et il s’était humilié, songeant à calmer uniquement l’oncle de Blanche, à lui donner toutes les satisfactions possibles. Mais, devant la rigueur de M. de Cazalis, devant le scandale qu’il soulevait, le jeune homme s’était révolté. Il avait vu les fugitifs, il savait que Blanche suivait volontairement Philippe, et il s’indignait d’entendre accuser ce dernier de rapt. Les gros mots marchaient bon train autour de lui : son frère était traité de scélérat, d’infâme, sa