Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/334

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songeait à son enfant. S’il avait éteint la lampe, s’il avait fait mine de se sauver, c’était uniquement pour gagner du temps.

Les bras croisés, dédaigneux, il dit à voix haute :

« Que me voulez-vous, pourquoi m’avez-vous forcé à ouvrir cette porte ? »

Les deux gendarmes s’étaient élancés et l’avaient saisi chacun par un poignet.

« Lâchez-moi, reprit-il avec force. Vous voyez bien que je me livre volontairement. Si j’avais voulu me sauver, je serais déjà loin... Parlez, que me voulez-vous ?

– Nous avons ordre de vous arrêter, répondirent-ils en le lâchant, dominés par les éclats impérieux de sa voix.

– C’est bien, reprit-il, je vous suivrai, lorsque vous m’aurez montré le mandat qui me concerne... Entrons. »

Il revint dans la salle, en feignant de ne voir ni Mathéus ni M. de Cazalis. Lorsqu’il eut allumé la lampe et que l’ancien député et son âme damnée se présentèrent, il se tourna vers les gendarmes, et d’un ton de raillerie :

« Ces messieurs sont de la police ? » demanda-t-il.

Le gentilhomme reçut cette phrase en plein visage comme un coup de fouet. Il eut conscience du rôle indigne qu’il jouait, et la colère sourde qui grondait en lui éclata.

« Qu’attendez-vous ? cria-t-il, bâillonnez ce misérable, garrottez-le. Ah ! coquin, je te retrouve, et cette fois, tu ne m’échapperas pas ! »

Il écumait, il demandait les menottes pour les mettre lui-même à Philippe. Celui-ci le regardait avec un mépris écrasant. Les gendarmes lui avaient remis le mandat d’amener lancé contre lui, et il en prenait connaissance, lentement, cherchant un moyen pour retarder encore le moment de son arrestation.

Pendant ce temps, Mathéus disparut. Il avait allumé un rat de cave qu’il portait sur lui, et il s’était glissé dans l’escalier. Il allait exécuter les ordres de M. de Cazalis qui lui avait promis une honnête récompense,