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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/343

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– Eh ! j’aime mieux te voir renoncer à cet héritage, pour le moment du moins, que de te laisser troubler de nouveau notre vie. Contentons-nous de nous défendre, et n’attaquons pas. Nous sommes trop faibles, nous serions brisés au premier heurt.

– Je voudrais que mon fils fût riche et puissant. J’ai de l’ambition pour lui, si je n’en ai plus pour moi.

– Ton fils est heureux, nous l’aimons et nous l’élevons en honnête homme. Crois-moi, il n’a besoin de rien, il serait peut-être plus à plaindre, si tu réussissais à en faire un riche héritier. »

Souvent, de pareilles conversations revenaient entre Philippe et Marius. Ce dernier sentait que M. de Cazalis était trop puissant pour qu’on pût l’attaquer avec des chances de succès ; il avait compris que l’ancien député, à la première occasion, prendrait encore l’offensive, et il voulait réserver toutes ses forces pour la défense. Son plus cher désir était de faire oublier de l’oncle de Blanche l’existence de Joseph et de Philippe.

D’ailleurs, de nombreuses raisons le poussaient à prêcher à son frère le désintéressement. Il craignait que celui-ci ne redevînt fou en devenant riche. Il rêvait en outre pour son neveu l’existence tranquille de commis, qu’il avait menée, et il ne croyait pas pouvoir lui préparer un avenir plus doux. Souvent, il se disait : « Cet enfant sera pauvre et heureux comme moi, il trouvera une Fine qui lui donnera les bonheurs que je goûte. » Au fond de lui, il avait décidé qu’il ne réclamerait jamais un sou à M. de Cazalis.

Quand Philippe le pressait par trop, il lui parlait de Blanche, il lui disait qu’un scandale tuerait cette pauvre fille, car M. de Cazalis ne se laisserait pas arracher plusieurs centaines de mille francs sans ameuter tout Marseille. C’est ainsi qu’il maintenait son frère et qu’il l’empêchait de faire un éclat, qui aurait pu causer des malheurs irréparables.

Enfin, Marius prouva à Philippe que l’heure n’était pas venue de se venger et de réclamer l’héritage. Dès lors,