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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/372

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déclarèrent même que les ouvriers qu’ils représentaient, s’étaient, dès le matin, rendus à leur travail comme à l’ordinaire. Tandis que les hommes paisibles se retiraient ceux qui voulaient à tout prix la manifestation, excités, poussés par Mathéus, entraînèrent leurs camarades. Un noyau se forma, qui alla toujours grandissant et qui finit par devenir une véritable foule. Le peuple était lancé et ne devait plus s’arrêter.

Lorsque Mathéus comprit qu’il n’avait plus besoin de pousser en avant cette foule, il la laissa se grossir d’elle-même et rouler vers la préfecture. Pendant ce temps, il acheva de disposer son plan de bataille.

Il voulut d’abord donner des nouvelles à M. de Cazalis, ainsi qu’il le lui avait promis. Neuf heures sonnaient. Pensant avec raison qu’on ne lui laisserait pas traverser la place Saint-Ferréol, alors pleine de troupes, il gagna le quai du Canal, prit la rue de Breteuil et se trouva à quelques pas de l’hôtel de son maître. Il lui fallait passer devant la maison habitée par les Cayol, située sur le cours Bonaparte, près de cet hôtel. En passant, il leva la tête et jeta un regard triomphant sur la maison.

Son plan devait dépendre des circonstances. Il comptait sur les troubles de l’insurrection pour voler Joseph. Sans doute Marius courrait à la recherche de son frère, dès le premier coup de fusil ; et, pendant ce temps, il lui serait facile d’aller arracher l’enfant des bras de Fine. D’ailleurs, il espérait que, la préfecture se trouvant voisine, tout le quartier prendrait feu : peut-être même élèverait-on des barricades dans les rues environnantes ; il attendait en un mot quelque événement qui lui faciliterait le rapt du petit, et il se jurai d’agir carrément, de risquer tout pour réussir.

Comme il regardait la porte une dernière fois, se rappelant l’intérieur de la maison qu’il étudiait depuis longtemps, il vit sortir, rapidement, une jeune femme qui tenait un enfant dans ses bras. Il reconnut Fine et le petit Joseph. Cette brusque sortie l’inquiéta, il se mit à suivre la jeune femme.