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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/396

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la rue, et se trouva au milieu des ouvriers, qui lui donnèrent de chaudes poignées de main. Marius le suivit et monta rapidement dans la chambre où se trouvaient Fine et Joseph.

Mathéus avait complètement réussi. Il était arrivé à ses fins, pas à pas, servi par les circonstances, marchant vers son but lentement et sûrement. C’était lui qui avait en partie conduit les événements poussant le peuple à l’émeute, l’amenant se battre là où il désirait que l’insurrection éclatât.

Après avoir déchargé son fusil sur le général, pendant que la foule terrifiée s’écrasait, il remonta en courant vers le Cours entraînant des groupes d’ouvriers. Il poussait ce cri de ralliement :

« À la place aux Œufs ! À la place aux Œufs ! » Dès qu’il fut parvenu à se faire suivre par une dizaine d’insurgés, il cria plus fort et eut bientôt toute une foule sur ses talons. Ce flot d’hommes armés qui traversait le rassemblement donna une direction à l’insurrection encore hésitante. Les ouvriers, ne sachant où se retrancher, se seraient peut-être dispersés ; mais, en voyant un groupe de leurs camarades courir et se diriger vers un endroit qu’ils désignaient, ils voulurent se rendre à ce rendez-vous, et tous ceux qu’un désir de vengeance poussait à la lutte se jetèrent dans la Grand-Rue. Bientôt la place aux Œufs fut pleine.

Mathéus, en arrivant sur la place, fit remarquer l’excellence de son choix aux ouvriers qui l’entouraient.

« Voyez donc, leur dit-il, l’endroit semble avoir été fait pour se battre. »

Cette parole courut dans la foule. En effet, la révolte devait éclater au milieu de la vieille ville, au sein de ces petites rues que l’on pouvait aisément barricader. Chacun sentit que l’insurrection était là chez elle, et on ne songea plus qu’à se battre. Un souffle d’irritation passait sur ces têtes ardentes.

Cependant, les ouvriers n’osaient agir. Le poste de