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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/64

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— C’est un homme d’une grande honorabilité. Mais je sais qu’il n’est pas de nos amis… Je professe cependant pour lui la plus profonde estime. Sa sœur, Mlle Claire, que j’ai l’honneur de diriger, est une de nos meilleures paroissiennes. »

Et, comme Marius le regardait, ne trouvant rien à répondre, Donadéi ajouta en rougissant légèrement :

« C’est une personne charmante, d’une piété exemplaire. »

Il salua avec une exquise politesse, puis ferma la porte doucement. L’abbé Chastanier et Marius, restés seuls sur le trottoir, se regardèrent ; et le jeune homme ne put s’empêcher de hausser les épaules. Le vieux prêtre était confus de voir un ministre de Dieu jouer ainsi la comédie. Il se tourna vers son compagnon, il lui dit en hésitant :

« Mon ami, il ne faut pas en vouloir à Dieu si ses ministres ne sont pas toujours ce qu’ils devraient être. Ce jeune homme, que nous venons de voir, n’est coupable que d’ambition…  »

Il continua longtemps, excusant Donadéi. Marius le regardait, touché de sa bonté ; et, malgré lui, il comparait ce vieillard pauvre au puissant abbé, dont les sourires faisaient loi dans le diocèse. Alors, il pensa que l’Église n’aimait pas ses fils d’un égal amour, et que comme toutes les mères, elle gâtait les visages roses, et négligeait les âmes tendres qui se dévouent dans l’ombre.

Les deux visiteurs s’éloignaient, lorsqu’une voiture s’arrêta devant la petite maison close et discrète. Marius vit descendre M. de Cazalis de la voiture ; le député entra vivement chez l’abbé Donadéi.

« Tenez, regardez, mon père ! s’écria le jeune homme. Je suis certain que le caractère sacré de ce prêtre ne va pas lui défendre de travailler à la vengeance de M. de Cazalis. »

Il eut la tentation de rentrer dans cette maison, où l’on faisait jouer à Dieu un rôle si misérable. Puis, il se