Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/365

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cette après-midi… Je suis certain que, si je puis y aller, la sainte Vierge me guérira.

— Mais, certainement, vous irez, répondit le jeune homme. Est-ce que vous ne vous sentez pas beaucoup mieux ?

— Oh ! beaucoup mieux, non !… Je sais très bien ce que j’ai, parce que j’ai vu mourir plusieurs de nos frères, là-bas, au Sénégal. Quand le foie est pris, et que l’abcès se fait jour au dehors, c’est fini. Les sueurs arrivent, la fièvre, le délire… Mais la sainte Vierge touchera le mal de son petit doigt, et il sera guéri. Oh ! je vous en supplie tous, qu’on me porte à la Grotte, même si je n’ai plus ma connaissance !

Sœur Hyacinthe, elle aussi, était venue se pencher.

— Soyez sans crainte, mon cher frère. Vous irez à la Grotte après le déjeuner, et nous prierons tous pour vous.

Enfin, elle put emmener Ferrand, désespérée de ces retards, très inquiète de madame Vêtu. Cependant, le sort du frère l’apitoyait ; et, tout en montant, elle questionnait le médecin, lui demandait s’il n’y avait vraiment plus d’espérance. Celui-ci eut un geste d’absolue condamnation. C’était folie que de venir à Lourdes dans un état pareil.

Il se reprit, avec un sourire.

— Je vous demande pardon, ma sœur. Vous savez que j’ai le malheur de ne pas croire.

Mais elle sourit à son tour, indulgente, en amie qui tolère les imperfections de ceux qu’elle aime.

— Oh ! ça ne fait rien, je vous connais, vous êtes quand même un brave garçon… Et puis, nous voyons tant de monde, nous allons chez de tels païens, que nous aurions fort à faire, de nous scandaliser.

En haut, dans la salle Sainte-Honorine, ils trouvèrent madame Vêtu gémissant toujours, en proie à des souffrances