Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/421

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Pierre avait suivi Marie, et il se trouvait derrière le dais, avec elle, comme emporté dans le vent de gloire qui lui faisait traîner triomphalement son chariot. Mais de telles poussées revenaient à chaque minute, en tempête, qu’il serait tombé sûrement, si une main rude ne l’avait maintenu.

— N’ayez pas peur, donnez-moi le bras. Autrement, vous ne pourrez rester debout.

Il se tourna, il fut surpris de reconnaître le père Massias, qui avait laissé le père Fourcade dans la chaire, pour accompagner le dais. Une extraordinaire fièvre le soutenait, le jetait en avant, d’une solidité de roc, les yeux pareils à des tisons, la face exaltée, couverte de sueur.

— Prenez donc garde ! donnez-moi le bras.

Une nouvelle vague humaine avait failli les balayer. Et Pierre s’abandonna à ce terrible homme, qu’il se souvenait d’avoir eu pour condisciple au séminaire. Quelle singulière rencontre, et comme il aurait voulu posséder cette foi violente, cette folie de la foi qui le faisait haleter ainsi, la gorge pleine de sanglots, continuant à clamer l’ardente supplication :

— Seigneur Jésus, guérissez nos malades !… Seigneur Jésus, guérissez nos malades !

Derrière le dais, le cri ne cessait pas, il y avait toujours là un vociférateur, chargé de ne pas laisser en paix la