Page:Zola - Les Trois Villes - Paris, 1898.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommes, Duvillard, Gérard et Dutheil, plastronnés et cravatés de blanc, graves et corrects.

— Nous vous le disions bien ! murmura Duvillard, fort ennuyé de l’aventure, tandis que Gérard tâchait de se dissimuler dans l’ombre.

Mais elle, souriante, enchantée, face au public, recevait l’orage de son air candide de vierge folle, comme on aspire l’air vivifiant du large, soufflant en bourrasque. Elle était de là, c’était l’air natal.

— Eh bien ! quoi ? répondit-elle au baron, qui voulait la faire asseoir. Ils sont gais, c’est très gentil… Oh ! que je m’amuse !

— Mais certainement, c’est très gentil, déclara Dutheil, qui se mettait à l’aise lui aussi. Elle a raison, il faut bien rire.

Au milieu du bruit qui ne cessait pas, la petite princesse de Harth, enthousiasmée, s’était levée, pour mieux voir. Elle secoua Hyacinthe.

— Dites, mais c’est votre père avec cette Silviane ! Regardez-les, regardez-les… Ah bien ! il en a un estomac, de se montrer ici avec elle !

Hyacinthe se dégagea, refusa de regarder. Ça ne l’intéressait pas, son père était idiot, il n’y avait qu’un gosse pour se toquer ainsi d’une fille. Et son mépris de la femme devint insultant.

— Vous m’agacez, mon cher, dit Rosemonde, en se rasseyant presque sur ses genoux, résolue à se faire reconduire et à le garder, ce soir-là, sous le prétexte de lui offrir une tasse de thé. C’est vous le gosse, qui posez pour ne pas vouloir de nous… Et il a raison, votre père, d’aimer celle-là. Elle est très jolie, je la trouve adorable, moi !

Alors, Hyacinthe ricana, fit allusion à la perversité connue de Silviane.

— Désirez-vous que j’aille le lui dire ?… Papa vous présentera, et vous ferez bon ménage.