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Page:Zola - Les Trois Villes - Paris, 1898.djvu/524

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humaine du monde. Aussi avait-il décidé d’y assister en silence, d’un air de hautaine désapprobation.

Inquiet, il regarda Rosemonde, car il était heureux d’avoir rompu, il craignit quelque caprice qui la lui ramenât. Pour la première fois de la journée, il desserra les lèvres.

— Comme camarade, ma chère, tout ce qu’il vous plaira.

Elle s’était mise à rire, elle lui expliqua qu’elle en mourrait, si elle n’assistait pas au début de Silviane, dont elle était l’amie, l’admiratrice passionnée ; et elle le supplia d’obtenir de son père qu’il la prît avec eux dans sa loge, où elle savait qu’il y avait une place.

Lui-même, alors, eut un sourire, en songeant que ce serait une fin d’une esthétique rare et symbolique, cette Silviane qui le débarrasserait de Rosemonde, ces deux femmes qui incarneraient l’amour infécond. Il était, au nom de la beauté, pour le mariage unisexuel qui n’enfante pas.

— C’est chose convenue, ma chère, je vais prévenir papa, il y aura une place pour vous.

Et le défilé, enfin, s’étant ralenti, la sacristie s’étant vidée un peu, les mariés et les deux familles purent s’échapper, parmi la foule bourdonnante, lente à s’écouler, qui s’attardait, stationnait, afin de les saluer et de les dévisager encore.

Gérard et Camille, tout de suite après le lunch, devaient partir pour une propriété que Duvillard possédait dans l’Eure. Et ce lunch, servi à deux pas de la Madeleine, dans le royal hôtel de la rue Godot-de-Mauroy, fut une nouvelle magnificence. Au premier étage, la salle à manger était transformée en un buffet d’une abondance et d’une somptuosité merveilleuses ; tandis que le vaste salon rouge, le petit salon bleu et argent, toutes les luxueuses pièces, portes ouvertes, permettaient un grand