de l’autel. On les admira pourtant, on leur fit une ovation, un murmure flatteur les accompagna, pour leur belle tenue, d’une impassibilité, d’une raideur militaire exagérée. Une Américaine les déclara des hommes superbes. Une Romaine donna à une amie, une Anglaise, des détails sur ce corps d’élite, disant qu’autrefois les jeunes gens de l’aristocratie tenaient à honneur d’en faire partie, pour la richesse de l’uniforme et la joie de caracoler devant les dames, tandis que maintenant le recrutement devenait difficile, au point qu’on devait se contenter des beaux garçons d’une noblesse douteuse et ruinée, simplement heureux de toucher la maigre solde qui leur permettait de vivre. Et, durant un quart d’heure encore, les conversations particulières reprirent, emplirent les hautes nefs de leur brouhaha de salle impatiente, qui se distrait à dévisager les gens et à se conter leur histoire, dans l’attente du spectacle.
Enfin, le cortège défila, et il était la grande curiosité attendue, la pompe dont on souhaitait ardemment le passage, pour l’acclamer. Alors, comme au théâtre, quand il apparut, de furieux applaudissements éclatèrent, montèrent, roulèrent sous les voûtes, lui faisant une entrée, ainsi qu’à l’acteur aimé, au grand premier rôle qui bouleverse tous les cœurs. Du reste, comme au théâtre encore, on avait réglé cette apparition savamment, de façon qu’elle donnât tout son effet, au milieu du magnifique décor où elle allait se produire. Le cortège venait de se former dans la coulisse, au fond de la chapelle de la Pieta, la première en entrant, à droite ; et, pour s’y rendre, le Saint-Père, qui était arrivé de ses appartements voisins par la chapelle du Saint Sacrement, avait dû se dissimuler, passer derrière la draperie de la nef latérale, utilisée de la sorte comme toile de fond. Les cardinaux, les archevêques, les évêques, toute la prélature pontificale, l’attendaient là, classés, groupés selon la hiérarchie, prêts à se mettre en marche. Et,