Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/359

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Ce soir-là, au crépuscule, comme Benedetta avait fait dire à Pierre qu’elle désirait lui parler, il descendit et la trouva dans le salon, en compagnie de Celia, causant toutes deux sous le jour finissant.

— Tu sais que je l’ai vue, votre Pierina, s’écriait la jeune fille, justement comme il entrait. Oui, oui, et avec Dario encore ; ou plutôt elle devait le guetter, il l’a aperçue qui l’attendait, dans une allée du Pincio, et il lui a souri. J’ai compris tout de suite… Oh ! quelle beauté !

Benedetta s’égaya doucement de son enthousiasme. Mais un pli un peu douloureux attristait sa bouche ; car, bien que très raisonnable, elle finissait par souffrir de cette passion, qu’elle sentait si naïve et si forte. Que Dario s’amusât, elle le comprenait, puisqu’elle se refusait à lui, qu’il était jeune et qu’il n’était pas dans les ordres. Seulement, cette misérable fille l’aimait trop, et elle craignait qu’il ne s’oubliât, la fleur de beauté excusant tout. Aussi avoua-t-elle le secret de son cœur, en détournant la conversation.

— Asseyez-vous, monsieur l’abbé… Vous voyez, nous sommes en train de médire. Mon pauvre Dario est accusé de mettre à mal toutes les beautés de Rome… Ainsi, on raconte qu’il faut voir en lui l’heureux homme qui offre les bouquets de roses dont la Tonietta promène la blancheur au Corso, depuis quinze jours.

Celia aussitôt se passionna.