Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/479

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possession de Rome, deviendrait le président auguste et souverain.

En terminant, Prada se mit à rire de nouveau, montrant ses dents blanches, peu faites pour lâcher la proie.

— Vous voyez que nous avons à bien nous défendre, car il s’agit de nous jeter dehors. Heureusement qu’il y a, à tout cela, de petits empêchements. Mais de tels rêves n’en ont pas moins une action énorme sur certaines cervelles exaltées, comme celle de ce Santobono par exemple ; et, tenez ! en voilà un que Sanguinetti mènerait loin, d’un mot, s’il voulait… Ah ! il a de bonnes jambes ! Regardez-le donc là-haut, il est arrivé, il entre dans le petit palais du cardinal, cette villa toute blanche qui a des balcons sculptés.

En effet, on apercevait le petit palais, une des premières maisons de Frascati, construction moderne, de style Renaissance, et dont les fenêtres s’ouvraient sur l’immensité de la Campagne romaine.

Il était onze heures, et comme Pierre prenait congé du comte, pour monter faire lui-même sa visite, celui-ci garda un instant sa main dans la sienne.

— Vous ne savez pas, si vous étiez très gentil, eh bien ! vous déjeuneriez avec moi… Voulez-vous ? Dès que vous serez libre, venez me rejoindre à ce restaurant, là, cette façade rose. Moi, en une heure, j’aurai réglé mes affaires, et je serai ravi de ne pas manger seul.

D’abord, Pierre refusa, se défendit ; mais il n’avait aucune excuse possible ; et il dut se rendre enfin, cédant malgré lui au charme réel de Prada. Dès qu’ils se furent séparés, il n’eut qu’à monter une rue, pour se trouver à la porte du cardinal. Ce dernier était d’un abord très facile, par un besoin naturel d’expansion, par un calcul aussi de jouer à l’homme populaire. À Frascati surtout, ses portes s’ouvraient à deux battants, même devant les plus humbles soutanes. Le jeune prêtre fut donc introduit tout de suite, un peu étonné de cet accueil,