— Évidemment, d’une fièvre infectieuse, comme le dit si bien Votre Éminence.
Deux grosses larmes, aussitôt, reparurent dans les yeux de Boccanera. Maintenant qu’il avait mis Dieu à l’abri, son humanité saignait de nouveau. Il supplia le médecin de tenter un effort suprême, d’essayer l’impossible ; mais celui-ci secouait la tête, montrait le malade de ses pauvres mains tremblantes. Pour son père, pour sa mère, il n’aurait rien pu. La mort était là. À quoi bon fatiguer, torturer un mourant, dont il n’aurait fait qu’aggraver les souffrances ? Et, comme le cardinal, devant la catastrophe prochaine, songeait à sa sœur Serafina, se désespérait en disant qu’elle ne pourrait embrasser son neveu une dernière fois, si elle s’attardait au Vatican, où elle devait être, le médecin offrit d’aller la chercher avec sa voiture, qu’il avait gardée en bas. C’était une affaire de vingt minutes. Il serait de retour, si, dans les derniers moments, on avait besoin de lui.
Resté dans l’embrasure, le cardinal s’y tint immobile, un instant encore. Par la fenêtre, les yeux obscurcis de ses larmes, il regardait le ciel. Et ses bras frémissants se tendirent, en un geste d’imploration ardente. O Dieu ! puisque la science des hommes était si courte et si vaine, puisque ce médecin s’en allait ainsi, heureux de sauver l’embarras de son impuissance, ô Dieu ! que ne faisiez-vous un miracle, pour montrer l’éclat de votre pouvoir sans bornes ! Un miracle, un miracle ! il le demandait du fond de son âme de croyant, avec l’insistance, la prière impérative d’un prince de la terre, qui croyait avoir rendu au ciel un service considérable, par sa vie entière donnée à l’Église. Il le demandait pour la continuation de sa race, pour que le dernier mâle ne disparût pas si misérablement, pour qu’il pût épouser cette cousine tant aimée, là, pleurante et si malheureuse à cette heure. Un miracle, un miracle ! au profit de ces deux chers enfants ! un miracle qui fît renaître la famille ! un miracle qui éternisât