Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/227

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Elle s’était retournée, elle me regardait d’un air malicieux.

— Venez , a-t-elle murmuré encore, du ton discret d’une amie qui m’aurait réservé quelque surprise heureuse.

Il m’a pris une folle envie de courir derrière elle, pour l’interroger. Mais elle avait déjà tourné dans un autre couloir, je me suis emporté contre mon sot amour-propre, qui m’empêchait d’avouer mon ignorance. Certes, j’étais prêt à aller là-bas ; mais où était-ce, là-bas ? Le vague de ce rendez-vous me mettait l’esprit à la torture, et j’éprouvais en outre une honte à ne pas savoir ce que le monde savait. Le soir, j’ai couru chez Félix, en me proposant d’obtenir de lui, d’une façon habile, le renseignement dont j’avais besoin. Félix était absent. Alors, désolé, je me suis plongé dans la lecture des journaux, choisissant les plus mondains et les plus répandus, tâchant de deviner, au milieu des informations publiées pour le lendemain, quel était le lieu où le bon ton voulait qu’on se donnât rendez-vous. Mes perplexités ont grandi, il y avait toutes sortes de solennités : une exposition de maîtres anciens, une vente de charité dans un grand cercle, une messe en musique à Sainte-Clotilde, une répétition gé-