Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/276

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Mais il avait beau chercher, il ne trouvait personne dans leurs relations qui aurait osé s’aventurer ainsi. Et il attendait, en imprimant à son ombrelle un mouvement de toupie, pour se distraire.

— Oui, expliquait Hector à la belle madame Chabre, je suis venu passer quelques jours chez mon oncle, dont vous apercevez là-bas le château, à mi-côte. Alors, tous les jours, pour prendre mon bain, je pars de cette pointe, en face de la terrasse, et je vais jusqu’à la jetée. Puis, je retourne. En tout, deux kilomètres. C’est un exercice excellent… Mais vous, madame, vous êtes très brave. Je n’ai jamais vu une dame aussi brave.

— Oh ! dit Estelle, toute petite j’ai pataugé… L’eau me connaît bien. Nous sommes de vieilles amies.

Peu à peu, ils se rapprochaient, pour ne pas avoir à crier si fort. La mer, par cette chaude matinée, dormait, pareille à un vaste pan de moire. Des plaques de satin s’étendaient, puis des bandes qui ressemblaient à une étoffe plissée, s’allongeaient, s’agrandissaient, portant au loin le léger frisson des courants. Quand ils furent près l’un de l’autre, la conversation devint plus intime.