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Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/285

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d’enfant pour les sucreries. Les coquillages lui emportaient la bouche, salés, poivrés, de saveurs si imprévues et si fortes, qu’il ne pouvait dissimuler une grimace en les avalant ; mais il aurait avalé les coquilles, s’il l’avait fallu, tant il s’entêtait dans son désir d’être père.

— Ma bonne, tu n’en manges pas ! criait-il souvent à Estelle.

Il exigeait qu’elle en mangeât autant que lui. C’était nécessaire pour le résultat, disait-il. Et des discussions s’engageaient. Estelle prétendait que le docteur Guiraud n’avait pas parlé d’elle. Mais lui, répondait qu’il était logique de se soumettre l’un et l’autre au traitement. Alors, la jeune femme pinçait les lèvres, jetait de clairs regards sur l’obésité blême de son mari. Un irrésistible sourire creusait légèrement la fossette de son menton. Elle n’ajoutait rien, n’aimant à blesser personne. Même, ayant découvert un parc d’huîtres, elle avait fini par en manger une douzaine à chacun de ses repas. Ce n’était point que, personnellement, elle eût besoin d’huîtres, mais elle les adorait.

La vie, à Piriac, était d’une monotonie ensommeillée. Il y avait seulement trois familles de baigneurs, un épicier en gros de Nantes, un an-