Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/289

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sales, le ventre noir de boue, le groin barbouillé, ronflant à terre. Mais Hector lui avait juré que les cochons étaient les meilleurs enfants du monde. Et, maintenant, elle s’amusait de leurs courses inquiètes à l’heure de la pâtée, elle s’émerveillait de leur robe de soie rose, d’une fraîcheur de robe de bal, quand il avait plu. Les oies aussi l’occupaient. Dans un trou à fumier, au bout d’une ruelle, souvent deux bandes d’oies arrivaient, chacune de son côté. Elles semblaient se saluer d’un claquement de bec, se mêlaient, happaient ensemble des épluchures de légumes. Une, en l’air, au sommet du tas, l’œil rond, le cou raidi, comme calée sur ses pattes et gonflant le duvet blanc de sa panse, avait une majesté tranquille de souverain, au grand nez jaune ; tandis que les autres, le cou plié, cherchaient à terre, avec une musique rauque. Puis, brusquement, la grande oie descendait en jetant un cri ; et les oies de sa bande la suivaient, tous les cous allongés du même côté, filant en mesure dans un déhanchement d’animaux infirmes. Si un chien passait, les cous se tendaient davantage et sifflaient. Alors, la jeune femme battait des mains, suivait le défilé majestueux des deux sociétés qui rentraient chez elles, en personnes